3 mars 2010

La loi suisse évolue...

Ou pas. Et je ne sais pas quoi en penser. Le Parlement suisse a, aujourd'hui, approuvé le texte suivant, contre l'avis du gouvernement :

Texte déposé

Le Conseil fédéral est chargé de légaliser par la voie législative la participation à des tournois de poker dans des cercles privés de même que l'organisation de tels tournois.

Développement

Depuis plusieurs années, le jeu de poker connaît dans tous les pays un boom qui a également touché la Suisse. Selon certaines estimations, plus de 200 000 personnes s'adonneraient régulièrement à ce passe-temps dans notre pays. Les chaînes de télévision consacrent tous les jours plusieurs émissions au poker. L'engouement pour les tournois de poker organisés dans et en dehors des casinos est énorme, et depuis peu on trouve un grand nombre de sites Web consacrés au poker. Dans notre pays, la plupart des joueurs s'adonnent actuellement au poker dans un cadre privé, avec des amis et des connaissances. Les mises, qui font l'intérêt du jeu, vont en règle générale de 5 à 100 francs.
Or, comme le poker est considéré chez nous comme un jeu de hasard (exception faite des tournois autorisés par la CFMJ), toute personne qui organise un jeu de poker est punissable - mais pas les participants - en vertu de la loi sur les maisons de jeu. Cette approche est dépassée. En effet, les chances de gagner au poker ne dépendent de loin pas uniquement du hasard, mais aussi de l'adresse du joueur, de ses capacités d'évaluer les probabilités de gain et de facteurs psychologiques. Partant de cela, le poker ne devrait plus être considéré comme un jeu de hasard, mais comme un jeu d'adresse légal, ce qui permettrait de sortir de l'illégalité les parties de poker organisées en privé. Les nouvelles dispositions légales devront prévoir un plafond pour les mises engagées.

Réponse du Conseil fédéral du 07.05.2008

En 1993, le peuple et les cantons ont levé l'interdiction de pratiquer des jeux de hasard pour de l'argent, en place jusqu'alors. La levée de cette interdiction est entrée en vigueur le 1er avril 2000, avec la loi sur les maisons de jeu de 1998, édictée sur la base du référendum. La loi sur les maisons de jeu concentre l'organisation de jeux de hasard pour de l'argent dans les maisons de jeu bénéficiaires d'une concession et rend punissables l'organisation et l'exploitation par métier de jeux de hasard en dehors de ces maisons de jeu. Car seule une telle concentration permet d'atteindre les buts de la loi, soit assurer une exploitation des jeux sûre, empêcher la criminalité et le blanchiment d'argent, et lutter contre les conséquences socialement dommageables du jeu.

Conformément au message du Conseil fédéral relatif à la loi sur les maisons de jeu, les jeux de hasard offrant des chances de réaliser un gain en argent ou d'obtenir un autre avantage matériel qui se déroulent occasionnellement en famille ou dans un cercle d'amis ne sont pas touchés par l'interdiction de proposer des jeux de hasard pour de l'argent en dehors des maisons de jeu concessionnaires. Aussi, lorsque la CFMJ est amenée à examiner de tels cas en tant qu'autorité de poursuite pénale, elle apprécie avec retenue la question de savoir si elle a affaire à l'organisation et/ou à l'exploitation de jeux par métier au sens de la loi.

La délimitation entre un jeu de hasard et un jeu d'adresse requiert souvent un examen approfondi. La CFMJ peut être appelée à tout moment à rendre une décision de qualification. Elle dispose d'une longue expérience en la matière. Dans certains tournois de poker, les éléments relevant du hasard passent à l'arrière-plan au profit de l'adresse. De tels tournois doivent être qualifiés de jeux de hasard, et non de jeux d'adresse, et peuvent donc être organisés légalement partout en Suisse. C'est pourquoi tout organisateur de tournois de poker a la possibilité de faire examiner par la CFMJ la conformité à la loi d'un tournoi concret. Si la CFMJ rend une décision positive, le tournoi peut être organisé sur l'ensemble du territoire suisse, sous réserve d'éventuelles restrictions cantonales. Les milieux intéressés savent que cette possibilité, mentionnée sur le site Internet de la CFMJ, leur est ouverte. S'agissant des "Cash-Games" de poker - parties indépendantes jouées pour de l'argent -, l'obtention d'un gain lors de chaque partie dépend de manière prépondérante du hasard, même si certains aspects du jeu relèvent de l'adresse. De tels jeux sont des jeux de hasard au sens de la loi, et peuvent donc uniquement être proposés par des maisons de jeu au bénéfice d'une concession. Les personnes intéressées ont ainsi la possibilité de jouer à des "Cash-Games" de poker au sein des maisons de jeu.
Vu les bases légales existantes et la marge de manoeuvre disponible, il n'apparaît pas nécessaire de procéder à la modification législative visée par l'auteur de la motion. Il devient dès lors superflu d'examiner la question de l'introduction d'une limite des mises pour les jeux de hasard proposés en dehors des maisons de jeu. Non seulement, la modification législative proposée par l'auteur de la motion ne répond à aucune nécessité, mais elle violerait l'esprit de la loi et briserait la cohérence du système légal en place. Créer une disposition qui soumettrait le poker, et lui seul, à un régime d'exception créerait une inégalité de traitement injustifiée qui entraînerait notamment une forte insécurité juridique. Une telle modification législative déploierait des effets diamétralement opposés aux buts légaux, et briserait un système qui a fait ses preuves.

Déclaration du Conseil fédéral du 07.05.2008

Le Conseil fédéral propose de rejeter la motion.



Voilà. Il faut savoir que, chez nous, il existe une commission qui, depuis 2007 déjà, est chargée de délivrer des autorisations pour l'organisation de tournois de poker en dehors des casinos. Cette autorisation, délivrée après étude d'un dossier complet, se base notamment, et entre autres, sur le statut de jeu d'adresse (contrairement à un jeu de hasard pur) du poker de tournoi -le cash game étant toujours considéré comme un jeu de hasard; allez comprendre...-. À l'époque, les casinos, se voyant délester d'une potentielle poule aux oeufs d'or, avaient fait recours contre cette commission, mais avaient perdu en appel devant le tribunal de la plus haute instance suisse. Ils gardaient toutefois le droit d'organiser des cash games comme bon leur semblait. Cependant, aucun d'eux (Barrière à Montreux, Tranchant à Bâle pour ne citer que les plus grands) n'ont réellement fourni l'effort nécessaire à la tenue de tournois de qualité dans leurs murs. Structure turbo et rebuy à gogo étant leur leitmotiv. Les choses changent toutefois un peu ces derniers temps, mais les casinotiers, en terme de structure et de capacité d'accueil, restent encore bien loin de certains organisateurs de tournois privés qui, eux, maîtrisent leur sujet. 

Le texte, soumis au vote aujourd'hui, propose simplement de ne plus passer par cette commission et de légaliser le poker, parce que c'est un jeu d'habileté, de technique et de stratégie avant tout. Si ce texte passe la rampe, on peut rêver d'avoir un grand tournoi international dans nos contrées, qui sait? Bref, la bataille politique est lancée et ce n'est qu'un début, puisqu'en Suisse aussi, on va bientôt statuer sur les jeux d'argent en ligne. 

Que d'émotions, que d'émotions...

Bet 300... Raise.. 1'100... All-in! Chhhht!...

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