30 novembre 2022

The Dead Don't Die

 Where the hell are my chickens ? - Farmer Frank Michael

11 ans. 11 ans que je n'avais pas rédigé un article ici, fatigué par ce jeu et l'environnement qui était (est) le sien, surtout en live. 11 ans, donc, que je n'avais pas régulièrement joué au poker malgré quelques brillantes tentatives autour des tapis de Prague, Barcelone ou Berne, principalement, voire uniquement, en cash game lors de vacances. 11 ans, aussi, enfin 11 jusqu'à l'été dernier, que le poker en Suisse était interdit hors casino, y compris, en principe, en ligne.

Mais voilà, il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis, spécialement quand Pokerstars devient l'un des seuls opérateurs agréés sur le territoire de mon pays de naissance, en 2021. J'ai donc repris, avec parcimonie, le chemin du poker en ligne le printemps dernier, et celui du live à peu près à la même période, la cardroom du coin ayant réouvert ses portes l'été dernier, curieux de constater ce qu'il était advenu de mon ex-jeu préféré. 

Si les tournois live m'ont paru étrangement familiers (j'ai pu d'ailleurs pu engranger un peu plus de 2k de gain pour 3 ITM dont une victoire), tant sur leur niveau que sur la composition sociale de leur field (aaah, qu'elles m'avaient manqué ces vieilles merdes ravagées -non), le poker en ligne, quant à lui, m'est apparu sous un jour nouveau. Ma première surprise a été de constater que les SNG, un de mes formats privilégiés, n'étaient plus du tout populaires sur la plateforme de Neymar. Des plombes d'attente pour remplir un tournoi full ring non turbo, même à 5 balles, impossibilité de s'enregistrer sur plusieurs tables d'un format donné, un wagon de reg à chaque session... Reste l'unique option des turbos, si l'on souhaite un tant soit peu multitabler. Bon, je ne m'attendais à rien mais je suis déçu quand même de ne pas pouvoir recommencer sur des formats que je connais(sais) et maîtrisais bien. 



16 novembre 2011

Le joueur de poker

Avant tout, une mise au point. A priori, je ne vous aime pas et je me contrefous de savoir si vous m’aimez ou si vous allez apprécier ou pas ce que je vais pouvoir radoter à longueur d’article. -Laurent Sagalovitsch; You'll never hate alone

Ces paroles, que j'aurais pu faire miennes, sont celles de Laurent Sagalovitsch, écrivain français et un (très bon) tenancier de blog sur slate.fr. Si l'on s'intéresse à lui aujourd'hui, c'est que le bougre a commis, en octobre dernier, un article passionnant à propos des joueurs de poker. Extraits, et commentaires:

Les temps modernes ont accouché d’une nouvelle forme de charlots, j’ai nommé, les joueurs de poker. Professionnels, j’entends.

Il va sans dire que le véritable joueur de poker a rédigé, lors de ses années de formation, une thèse de troisième cycle sur “ Dostoïevski ou le prisme de la narration transcendantale mis à l’œuvre dans l’intertextualité structuraliste de Crime et Châtiment “, s’est encanaillé l’esprit avec la correspondance secrète et encore inédite entre Freud et Jung, avec Heidegger comme juge arbitre, et s’endort toutes les nuits en convoquant comme marchand de sables le fantôme de Nietzsche papotant avec celui de Lautréamont.

Les joueurs de poker d’aujourd’hui sont les joueurs d’échecs d’hier. Le cerveau en moins, les lunettes noires en plus. Déjà dit, je sais. Toute cette frime de pacotille lorsqu’ils découvrent leurs cartes, du bout de leurs doigts, avec la même intensité dans le regard que celui d’un chimpanzé qui croise son reflet dans un miroir déformé.

Le boum du poker et la déferlante médiatique qui en a suivi ne sont évidemment pas étrangers à la création du mythe du joueur de jeu de cartes. Des arrière-salles enfumées, de voyous dégénérés, les afficionados de poker se sont d'un seul coup vus promus au rang d'immenses intellectuels sportifs dont les capacités au raisonnement mathématiques n'ont d'égale que les talents anthropo-sociologiques.

C'est bon pour l'industrie, tout comme c'est bon, de temps en temps, de mettre en lumière un immense chattard remportant quelques millions de dollars américains. Bref, cette définition moderne du cowboy puant prêt à faire parler la poudre a le mérite de, outre celui d’anoblir la caste, d'entraîner d'étranges mutations comportementales dans l'appareil cérébral des professionnels.

Sans revenir sur le fond de l'article de Sagalovitsch, on a découvert que jouer au poker demandait des compétences que seul un être supérieur pouvait maîtriser. Probabilités, statistiques, PNL, psycho-linguistique, comportementalisme (quand ce n'est pas mentalisme), pour ne citer que les plus saillantes, sont devenus des compagnons de route fidèles pour le gambler professionnel. Au moins, il sait comment s'occuper quand il déprime, tout seul à l'aéroport en attendant l'avion.

Sauf que, au poker, il y a la chance. Tous les joueurs vous le diront, la chance influe énormément les résultats d'un joueur à court terme. À long terme, normalement, le talent et l'art du jeu prennent le dessus. Seulement, le hasard est capable de détruire en un clin d'oeil tous les plans alambiqués que seul l'esprit torturé d'un joueur de poker professionnel peut élaborer. Comme ça, pfiut ! Alors de là à se comparer à un joueur d'échecs, il y a un monde.

La vérité, c'est que très peu de joueurs professionnels possèdent des intellects supérieurs à la moyenne (même si certains, à l'image de M. Caro, peuvent être comparés à des chercheurs empiriques; bon, c'est pas pour rien non plus que son surnom est "the mad genius"). Ce serait plutôt le contraire. Par contre, ils ont sûrement du talent, talent que l'on pourrait à la limite qualifier d'artistique, mais sans plus. Ces gens-là montrent aussi des caractéristiques propres à la pratique du jeu; de la même façon que tout le monde ne peut jouer au Barca, tout le monde ne peut pas vivre des cartes. L'adoption de ce style de vie demande des dispositions d'esprit très, très particulières. Et peu communes. Dont certaines sont certes cérébrales, mais qui se situent tout de même bien loin d'un troisième cycle universitaire.

Pour finir, il serait bien mal vu de tenir les joueurs pour seuls responsables de cette image. Si certains d'entre eux entretiennent volontiers le cliché, d'autres n'ont jamais rien demandé à personne et subissent comme tout le monde cette construction culturo-médiatique (c'est pas leur faute, ils lisaient Schopenhauer. Sur leur Ipad, dans les chiottes du Rio.). À ce propos, on n'a jamais vu les vieux de la vieille (Brunson, Chan, Hellmuth et consorts) se réclamer de quoi que ce soit en matière de production intellectuelle. Autres temps, autres moeurs.

7 novembre 2011

Vieilles merdes ravagées

Ouais, bon, ok, désolé les gars (et la fille), je vous avais pas dit. Pas dit que ce week-end je sautais dans un avion, direction Wien-Vienne-Vienna, pour y jouer une manche des DSO de Chilipoker. C'est pas super grave non plus, vu que je ne me pointais plus trop par ici depuis un petit moment, mais je tenais à vous le dire. L'honnêteté dans la communication entre les gens, ça paie. 

Le voyage se passe bien, pas de souci. L'avion prend plus d'une heure de retard au décollage, avant de céder pour un add-on de trois autres bons quarts d'heure au-dessus de la capitale autrichienne.Rien de sérieux au final, on se pose malgré le mauvais temps. Hôtel, douche, en route vers le Montesino pour s'inscrire pour le day 1B. Une pizza et une bouteille de rouge, servis par une très jolie serveuse, plus tard, retour au CardCasino pour tâter l'ambiance. Tout va bien, rien n'a changé depuis l'année passée. Je vous passe les détails de la soirée. Dodo, lever pas trop en forme pour l'event. Passer en revue  mes mains, les pots et tout ce chenis serait rebarbatif et un peu casse-couille, je vais donc laisser twitter le faire pour moi. Bien sûr, il manque nombre d'informations, mais bon, je m'en tape un peu.


Viens de perdre KK vs 44, dois fold river sur 84x8x. 25000. Super.
QT en 3bet qui passe, retour à... 20k.  

Il s'est passé un truc: blinds 200-400, AQ vs AK. 15k.
 
Ca sent le sapin, je vais pas passer le dinner break, imo.
300-600, KJs B. Raise CO 1.5k, je push 10.9k pour resteal. -l call et montre.. AK. FD au flop, pas de miracle. 1er early bust depuis 1912.
En souffrance tout le tournoi, je saute donc avant le dinner break. Pour la première fois depuis que je joue à ce jeu; dans un tournoi de cette structure, j'entends. Pas la fin du monde, certes, mais le reste du séjour sera du même accabit. CG NL200, Limit Stud 3-6, NL100, je perds tout, tout le temps et je souffre. Encore. C'était pas mon week-end, c'est sûr, mais au-delà du bad run, qui est loin d'être le premier, j'ai cessé de me faire des illusions sur le milieu et les gens qui le composent.

 Je ne veux en aucun plagier le par ailleurs très bon Lost Vegas (excepté les coquilles d'impressions), mais, là où je le rejoins, c'est sur le portrait des joueurs de poker live. Quoi soit d'accord, dudes, je sais qu'il y a des exceptions et je ne parle ici que de la faune du live. 

Avant, et pendant longtemps, j'aimais beaucoup cette ambiance de poker live. Cette dernière, avec tous ces joueurs réunis à la quête du Graal en tournoi ou, plus modestement, du gros coup en CG, m'attirait beaucoup. J'aimais traîner dans les travées, errant entre les tables, à la recherche d'un main intéressante, d'un commentaire drôle, d'un call douteux,... Je trouvais même que ça avait un côté noble, pour tout vous dire. Noblesse du jeu d'argent où les décisions prises n'ont rien de hasardeuses. Enfin, ça, c'est se que je croyais. Au début.

La vérité, c'est que j'en suis revenu de ce jeu (voir à ce sujet mon précédent billet). Mais là, c'est autre chose. L'ambiance, cette ambiance que je recherchais parfois, les joueurs,  les floors, tous, m'ont fait revenir les pieds sur terre et regarder ce bordel d'un oeil nouveau. Je n'ai pas aimé ce que j'ai vu.

Des floors, venant quasiment ordonner aux joueurs de CG de donner des tips (ce ne fut pas mon cas, mais ce n'est pas pour autant que j'ai apprécié la manoeuvre), aux joueurs de tout bord, vieilles merdes ravagées, crevards en quête de reconnaissance gagnée à force de chatte, tout le microcosme de ce jeu de cartes me sort par le nez (et le cul, enfin dépend de ce que j'ai mangé et bu la veille). Du petit ventripotent chauve et sexiste au clochard en quête de beuh, en passant par les bites sur patte, les connards qui pensent que lâcher 100€ en CG leur donne le droit de vomir sur le personnel, et ceux qui sont capables de gambler sur des pots de 1200€ sans lâcher plus qu'un euro de tip (le genre à prendre une pute à 500$ par derrière, en lui parlant de ses as craqués, pour paraphraser McGuire -Lost Vegas) il n'y a rien à  sauver dans cette jungle. Sans compter que les mecs, ils arrivent pas à te sortir plus de trois mots sans y introduire les mots "as", "roi", "bad beat" ou "j'ai callé"... Overdose. Si l'enfer existe, il ressemble à ça. Sans aucun doute. Et pour le sens de l'humour, on repassera.

On est loin du parallèle entre joueurs de poker et d'échec. Entre nous, c'est le moment, parce que, faut pas déconner, ce n'est pas le même monde, mais si vous voulez le croire encore et encore.

Bref, j'en ai soupé de cette ambiance, mais surtout des gens. Oui, chers amis, il y a des exceptions et des gens biens là-dedans. Mais franchement, je les ai pas vus ce week-end. 

La morale de cette histoire est, outre qu'il est toujours difficile de trouver une chute rigolote quand on est à poil sans ses bottes (Renaud), est que je cesse toute activité en lien avec le poker right now. Comme je n'aime pas les contraintes, je me laisse le droit de recommencer en 2011. Pour autant que plaisir et envie soit de la partie. Je m'autoriserai sans doute ni certitude un peu d'online l'année prochaine, pour le plaisir que je dois retrouver, un-deux tournois live à l'étranger, une-deux parties entre amis, et j'insiste sur amis. Je ne ferme pas ce blog, je vais continuer à y écrire, mais de façon plus "autour du poker", à travers laquelle je détaillerai des expériences, des anecdotes, et livrerai quelques analyses sur mon vécu. Enfin, si j'ai le temps.

- Vider mes comptes PS et Moneybookers --> fait.
- Verser l'argent de ma BR live sur mon compte-courant --> fait.
Bonne chance les cocos.

Sinon, j'ai ouvert, il y a peu, un autre blog, plus généraliste, sur lequel je peux coucher tous mes délires. Peut-être que je posterai son adresse sur celui-ci, une fois. Ou pas.

23 août 2011

Psychanalyse

'Il est impossible d'ignorer dans quelle mesure la civilisation est fondée sur une renonciation à ses instincts.' -S. Freud

Hier, ou avant-hier, j'apprenais l'arrêt du blog d'Olivier. Je ne le connais pas IRL, mais j'ai beaucoup de sympathie pour ce blogger avec qui nous avons échangé quelque fois. Le fait est, au fil de ses billets successifs, qu'Olivier semble avoir peu à peu pris le chemin d'une réflexion profonde sur lui-même, sa vie, ses objectifs, ses désirs, son ambition.. et la suite à donner à sa pratique du poker, par extension. 

La grandeur d'esprit de tout homme (ou femme) réside dans la capacité de se remettre sans cesse en question. De se demander si ce que l'on fait est juste. Juste pour nous, dans le sens où cela répond à un désir ou nous permet de mieux se sentir dans sa vie d'homme (ou de femme). L'instinct et les émotions -même s'ils n'ont pas leur place à une table de poker- se manifestent tous les jours; le challenge réside dans leur identification, puis leur reconnaissance, avant de leur donner à manger. Ça peut faire mal, ça peut casser, mais c'est nécessaire, tôt ou tard. 

Le poker me lasse. Les sites de poker me lassent. Les news poker me lassent. Les émissions TV de poker me lassent. Les discussions de poker me lassent. Le monde et les gens du poker me lassent. J'ai pensé à arrêter ce blog. À arrêter slowrolled. J'y pense toujours. Il y a plus de chances que j'arrête le deuxième que le premier. Le blog, ce blog, n'est rien d'autre qu'un exutoire parce que j'adore écrire. J'adore écrire et écrire sur le poker, c'est facile. Cet aspect mis à part, le microcosme du poker, ses valeurs, sont dérisoires. Ce monde, que j'ai connu de loin, puis de près (pas trop non plus), rassemble en une seule entité tout ce que j'aime le moins chez l'être humain: la mise en valeur d'egos surdimensionnés, la mesquinerie, le mensonge ou encore le mercantilisme outrancier.

A contrario, et peut-être en contrepartie, il offre le rêve et une certaine idée de liberté. J'aime ce jeu, pour lui-même, même s'il me lasse. Aussi. Je ne vais pas arrêter de jouer. Surtout pas live. Surtout pas 'entre amis', surtout pas à l'étranger au moins une fois par année. Mais il est temps pour moi de remettre les choses à leur place. J'ai bouffé et re-bouffé du bouquin poker, des magazines, des vidéos, pour apprendre, mais la réalité du jeu m'a rattrapé, en tout cas dans la perspective du grindage. Le poker est un jeu à petite marge, à haute variance, dans lequel la chance est reine à court terme; je crois que je suis en train de l'accepter, de le reconnaître, et ça me tue. Il est temps de faire le deuil des illusions et de prendre le jeu pour ce que je veux qu'il me procure: du plaisir d'avoir 'bien joué', des montées d'adrénaline, un one-time par ci, par là, et le bonheur de pouvoir profiter, de temps à autre, d'un extra dans les finances du ménage. 

Je ne vais pas arrêter de jouer, je viens même de me mettre quasi exclusivement au CG PLO, espèce de bouffée d'oxygène dans ce monde où règne l'autoritaire THNL sur lequel tout le monde a un avis et possède un doctorat. Je me mettrai aussi au stud, plus tard, puis au HOSE et/ou HORSE. La variété est le sel de la vie. Mes menus THNL étaient bien fades. Le plaisir de la pratique du PLO met en lumière combien j'étais devenu 'insensible' au THNL; combien ce dernier ne me faisait plus 'vibrer'. Peut-être cela reviendra, peut-être pas. 

Cela ne reste qu'un problème de poker, un grain de sable inexistant dans la vie d'un homme.

Bravo Olivier pour ton blog qui a occupé, en son temps, une vraie place dans la blogosphère (génial ce terme, on devrait donner une médaille au mec qui l'a inventé); merci pour l'interview (j'ai pas retrouvé le lien, cherchez sur son blog. Ou pas.).


9 août 2011

La définition du bonheur


NL50 un pot 3bet preflop, oop, je check mes 2nd nuts et là, un instant rarissime... Le bonheur. L'ami fish a KJ.

Le bonheur au poker, c'est comme dans la vie. Ça fait un bien fou, mais c'est pas souvent. Vraiment pas.